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Ronan Dantec a interrogé Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, sur l'état d'avancement des plans nationaux d'action sur les espèces protégées prévus par la loi biodiversité au regard du récent constat dressé par le rapport publié par le groupe international d’experts sur la biodiversité des Nations Unies (IPBES) le 6 mai 2019 qui confirme que nous sommes à l'origine et subissons la sixième extinction massive du vivant. Au vu de la réponse du Gouvernement (que vous trouverez ci-dessous) qui fait état du retard pris dans la mise en œuvre de ces plans, il espère que cet engagement international de la France sera tenu rapidement.

 

M. Ronan Dantec. Ma question s’adresse à M. François de Rugy et complétera celle de Jérôme Bignon.

Le Président de la République a eu des mots forts pour commenter le rapport dramatique de l’IPBES, évoquant des faits « cruels » et la nécessité de changer de modèle économique de production. Il n’est pas le premier à trouver les mots. Tout le monde se rappelle l’orfèvre en la matière que fut Jacques Chirac, lors du sommet de la Terre, à Johannesburg. À l’inverse de ses prédécesseurs, qui ont finalement beaucoup laissé brûler la maison, Emmanuel Macron sera-t-il le premier à définir et appliquer des politiques publiques à la hauteur de ces défis redoutables ? La crédibilité de la réponse passera par des actes, rien que par des actes, et par de vrais investissements.

À l’heure où, mû par une légitime émotion, notre pays se mobilise pour reconstruire une cathédrale au cœur de son histoire, l’État peut-il laisser se perdre des pans entiers de son patrimoine naturel ? Aujourd’hui, 120 espèces endémiques sont en danger d’extinction en France, notamment dans les territoires ultramarins, où beaucoup de ces espèces se portent bien plus mal que le bouquetin dans les Alpes.

Nous avons voté, dans la loi Biodiversité, et j’ai eu l’honneur de porter cet amendement, un article disposant que toutes ces 120 espèces devraient, d’ici au 1er janvier 2020, faire l’objet d’un plan national d’action. Je vous rejoins sur ce sujet : les plans nationaux d’action se sont souvent traduits par des résultats remarquables.

Monsieur le ministre d’État, ma question est simple et précise : où en est-on ? La France tiendra-t-elle cet engagement et à quel coût ? Sauver la biodiversité ne consiste bien évidemment pas à se payer de mots, mais à investir résolument dans l’avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Jérôme Bignon applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Vous avez raison, monsieur le sénateur, nous sommes à un moment important pour la biodiversité, marqué à la fois par le rapport de l’IPBES, que vous avez cité, par le G7 des ministres de l’environnement, à Metz, sous l’égide de François de Rugy, qui a tenu à mettre la biodiversité au cœur des discussions intergouvernementales, et par le discours du Président de la République, après sa rencontre avec les scientifiques de l’IPBES, qui a déclaré que nous allions agir.

Nous allons agir en consacrant le premier conseil de défense écologique, qui se tiendra autour du Président de la République avant la fin de ce mois, à la préservation de la biodiversité. Nous allons agir sur la transition agricole, nous allons agir sur l’étalement urbain et la lutte contre l’artificialisation des sols, nous allons agir sur la lutte contre le gaspillage et les déchets.

Vous posez une question précise sur les espèces endémiques en danger, qui doivent faire l’objet, comme vous l’avez souligné, depuis la loi Biodiversité de 2016, de plans de protection, dits plans nationaux d’action, ou PNA.

Nous avons lancé 65 PNA, dont 16 pour des espèces ou des plantes ultramarines. Comme nous le savons tous, les grands enjeux se situent très largement en outre-mer, où est concentrée 80 % de notre biodiversité.

Ces 65 plans, en cours de mise en œuvre, concernent à la fois des espèces classiques en métropole – je pense, par exemple, au milan royal ou à l’aigle de Bonelli – et des espèces ultramarines : l’iguane des Petites Antilles, le gecko vert de La Réunion, les tortues marines des Antilles et de la Guyane. Un plan concernant l’albatros des TAAF est également en cours de lancement.

Nous allons continuer ce travail indispensable sur ces plans. C’est à l’ordre du jour de l’Agence française pour la biodiversité, et bientôt de l’OFB, ou Office français de la biodiversité, qui sera créé au 1er janvier 2020. Nous allons travailler pour lancer des plans complémentaires et peut-être en regrouper certains afin de couvrir les 120 espèces concernées. C’est notre objectif, et il est important.

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour la réplique.

M. Ronan Dantec. Je vous remercie de cette réponse précise, madame la secrétaire d’État.

Le milan royal n’étant pas une espèce endémique, cela signifie qu’il reste encore probablement une centaine d’espèces endémiques en voie de disparition qu’il convient de protéger par des plans.

J’espère que nous tiendrons, à quelques mois près – il est clair que l’échéance du 1er janvier 2020 ne sera pas atteinte –, cet engagement international de la France, car il s’agit bien d’un engagement international.