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  • 10 mai 2016. Projet de loi biodiversité. Intervention de Ronan Dantec au nom du groupe écologiste

    Projet de loi biodiversité, 2ème lecture au Sénat. Intervention de Ronan Dantec au nom du groupe écologiste, 10 mai 2016.

    M. le Président, M. le président de la Commission, M. le rapporteur, Mme la Secrétaire d’Etat,

    Mes chers collègues,

    Lors de la discussion en commission, un amendement, non retenu, proposait de supprimer le mot « reconquête » du titre du projet de loi biodiversité. Ce n’était pas absurde car, effectivement, plusieurs amendements adoptés ont en partie vidé le projet de loi de cette ambition, malgré les signaux d’alerte sur l’effondrement de la biodiversité, comme la baisse massive des populations de passereaux ou le fait que les trois quarts des habitats naturels en France sont considérés en état de conservation défavorable. De toute évidence, malgré l’urgence, ce projet de loi est ainsi encore jugé démesuré dans son ambition par un certain nombre de sénateurs et, en commission, nous avons par exemple supprimé le principe de non-régression dans le code de l’environnement, ou encore la précision selon laquelle les mesures de compensation visent un objectif de zéro perte nette de biodiversité.

    Ainsi, d’amendements en amendements, nombre de sénateurs, principalement de droite, il faut bien le reconnaître, et heureusement pas toujours majoritaires, ont dessiné une vision qui ne considère toujours pas que la préservation de la biodiversité est un enjeu majeur pour notre propre avenir, notamment pour notre alimentation, notre santé et notre développement économique, mais bien que la nature reste ce monde hostile qu’il s’agit de repousser aux lisières de la civilisation, de ne garder que pour quelques activités secondaires de loisirs, en se félicitant donc d’avoir éradiqué les loups, les ours et les mauvaises herbes sur les trottoirs.

    Dix ans après le Grenelle de l’Environnement, ce rapport atavique à la nature trouve donc encore ici à s’exprimer. « L’environnement, ça commence à bien faire » est une musique à laquelle certains restent sensibles, surtout quand elle est reprise par de puissants chœurs de lobbies pour lesquels l’enjeu immédiat de leur propre business sera toujours prioritaire sur l’intérêt général.

    L’exemple des néonicotinoïdes l’incarne. Nous connaissons aujourd’hui, par des travaux scientifiques qui ne sont plus contestés, leur toxicité, pour les abeilles bien sûr, mais aussi pour la santé humaine. Le coût de leur utilisation est considérable et ne se limite pas à la production de miel. C’est toute la pollinisation qui est concernée, avec une baisse de production de fruits par exemple. La responsabilité du législateur est donc bien de préserver l’intérêt général, ce qui passe par leur interdiction rapide, sans pour autant nier l’impact sur les activités agricoles existantes. Plusieurs propositions d’amendements dessinent un compromis acceptable, avec des dérogations à cette interdiction rapide, notre collègue Nicole Bonnefoy en présente un, mais nous pouvons encore craindre que le Sénat ne cherche ici qu’à retarder les échéances, sans considération pour leurs effets négatifs globaux.

    La taxation de l’huile de palme est un autre de ces sujets qui disent le poids des lobbies. Les gouvernements indonésien et malaisien se sont légitimement inquiétés de nos décisions audacieuses lors de la première lecture au Sénat, nous les avons rencontrés. Il ne s’agit pas de balayer leurs arguments, leurs propres enjeux de développement doivent aussi être considérés ; et je me méfie toujours de nos simplismes, de notre capacité à nous mobiliser pour exiger la protection des lions et des orangs-outangs à l’autre bout du monde sans être capable de construire nos propres consensus pour relâcher quelques ours dans les Pyrénées. Mais, pour autant, il est aberrant de se retrouver avec des huiles de palme moins taxées que nos productions locales, comme l’huile d’olive par exemple, et de ne pas chercher à développer des filières écologiquement responsables et certifiées. Car ce sont bien aussi nos propres consommations qui détruisent la planète, et développer une consommation mondiale responsable fait aussi partie de nos responsabilités de législateurs. L’Assemblée avait trouvé un bon compromis, mais le Sénat l’a supprimé. Par compréhension des arguments des pays producteurs peut-être, mais aussi, probablement, voire encore plus, parce que nos géants de l’agro-alimentaire veulent continuer à disposer d’une matière première bon marché pour leurs biscuits et autres productions, et là encore sans se soucier, pour beaucoup d’entre eux, de tout enjeu de biodiversité.

    Le débat politique environnemental reste probablement le plus schizophrénique, entre multiplication des envolées lyriques sur l’avenir de nos enfants et petits-enfants, et mobilisation permanente pour que rien ne change, de tous ceux qui, pour une raison ou pour une autre, ont une activité à défendre, qui les céréaliers, qui l’agro-business, qui la pêche en eau profonde, qui les chasses traditionnelles... la liste est sans fin. Là où il faudrait trouver les compromis pour faire évoluer rapidement les pratiques en accompagnant leur évolution, c’est quasiment toujours autour du fait de repousser en permanence les échéances que se construit au final une grande coalition du refus. Il y a néanmoins une exception à ce tableau sombre : le Sénat a avancé sur le préjudice écologique.

    Pourtant, la gravité des crises environnementales est telle que c’est bien notre système économique traditionnel qui risque de se désagréger, et on en a déjà devant les yeux les premières manifestations : des crises des réfugiés en Europe aux incendies gigantesques du Nord du Canada, c’est même tellement l’actualité que nous ne le voyons pas. Tout immobilisme est aujourd’hui coupable, cette loi est un outil modeste pour amorcer ce sursaut. Ne nous en privons pas. En tout état de cause, le groupe écologiste votera contre le texte du Sénat s’il apparaît trop en retrait par rapport au texte de l’Assemblée nationale, mais nous avons encore deux jours pour montrer notre compréhension des enjeux, assumer notre part de responsabilité face à des désastres annoncés.

  • 12 juillet 2016. Biodiversité, le groupe écologiste refuse de voter un texte ayant perdu son ambition.

    Ci-dessous le communiqué de presse du groupe écologiste qui fait suite au vote en dernière lecture du projet de loi sur la biodiversité et l'intervention de Ronan Dantec au nom du groupe écologiste.

    Dernière lecture de la loi Biodiversité au Sénat : Le groupe écologiste refuse de voter un texte ayant perdu son ambition.

    adult 22054 640Deux ans et quatre mois se seront écoulés entre la présentation du projet de loi sur la biodiversité en conseil des ministres, son examen en dernière lecture ce lundi au Sénat, et sa probable adoption définitive par l’Assemblée nationale la semaine prochaine. Pour Ronan Dantec, Sénateur de Loire-Atlantique et Chef de file pour le groupe écologiste : “C’est très long et cela dit clairement la difficulté à trouver des accords sur l’enjeu de protection de la biodiversité et de l’environnement, qui de plus en plus représente un des grands clivages politiques, autour de perceptions culturelles et de priorités économiques différentes”.

    Une nouvelle fois, la droite sénatoriale a montré que la protection de l’environnement n’est pas une priorité pour elle, en adoptant un texte de loi qui n’est pas à la hauteur des enjeux, dans lequel ont été supprimées les exigences de “zéro perte nette” et les obligations liées à la compensation des atteintes à la biodiversité affaiblies. Pour Ronan Dantec, “ce texte porte la marque de lobbys relayés par la droite sénatoriale qui refusent toute évolution de leurs activités vers un plus grand respect de l’environnement et de la santé.”

    bee 1495037 640Malgré les demandes répétées de la société civile de mettre fin à l’utilisation des pesticides néonicotinoïdes (forts d’un soutien sans faille de quelques parlementaires), ces derniers ont encore de belles années devant eux, et ce malgré les dégâts irréversibles avérés qu’ils infligent à l’environnement et à la santé. Si le compromis trouvé entre les deux chambres acte leur interdiction à terme, Joël Labbé, Sénateur du Morbihan, espère que les mécanismes de substitution des néonicotinoïdes seront efficaces et rapides. “C’est essentiel pour la santé des agriculteurs, de l'environnement, et de notre économie. C'est l'aboutissement de plus de deux ans de lutte au Parlement. Je regrette les délais, mais il faut savoir admettre les compromis”.

    L’amendement écologiste qui visait à supprimer l’avantage concurrentiel de l’huile de palme par rapport aux autres huiles a été rejeté. “On cède de façon inconsidérée à des lobbys économiques pour des résultats ravageurs : destruction de milliers d’hectares de forêt et de cultures vivrières, spoliation des populations locales au profit de multinationales. L’avantage concurrentiel incite à utiliser toujours plus d’huile de palme dans des milliers de produits alimentaires, au détriment de la santé et de la production locale. C’est proprement scandaleux” dénonce Aline Archimbaud, Sénatrice de Seine-Saint-Denis.

    Cette ultime lecture devant le Sénat n’aura pas permis de trouver des points de consensus avec l’Assemblée nationale qui repartira de son texte pour une adoption définitive le 19 juillet. Comme le fait remarquer Hervé Poher, sénateur du Pas-de-Calais, “Bien que le texte de l’Assemblée soit un peu alambiqué, en particulier sur certains sujets comme l’huile de palme, il reste plus ambitieux que celui qui sort du Sénat”.

    Le groupe écologiste du Sénat n’a pas souhaité s’associer à ce texte en recul sur ses ambitions et a décidé de voter contre.

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    Intervention de Ronan Dantec au nom du groupe écologiste

    M. le Président, M. le président de la Commission, M. le rapporteur, Mme la Secrétaire d’Etat, Mes chers collègues,

    Deux ans et quatre mois se seront écoulés entre la présentation du projet de loi sur la biodiversité en conseil des ministres et son adoption définitive par l’Assemblée la semaine prochaine. C’est très long et cela dit clairement la difficulté à trouver les accords sur un enjeu qui est, de plus en plus, un des grands clivages politiques, autour des perceptions culturelles comme des priorités économiques. Mais nous arrivons au bout du travail sur ce projet de loi et il faut saluer le travail parlementaire d’enrichissement du projet de loi car de nombreuses avancées ont été intégrées au texte par amendements parlementaires.

    L’introduction de la réparation du préjudice écologique est indéniablement un grand pas en avant et même si le Sénat et l’Assemblée ne sont pas parvenus pas à s’accorder sur un texte commun, il restera dans cette loi et c’est une avancée majeure pour la mise en œuvre du principe pollueur-payeur.

    Le groupe écologiste s’est fortement mobilisé sur ce projet de loi et a obtenu plusieurs avancées.

    L’interdiction des pesticides néonicotinoïdes qui est apparue dans plusieurs versions variablement ambitieuses du projet de loi est l’aboutissement de plusieurs années d’un travail acharné pour convaincre de leur extrême dangerosité, de la part de nombreux écologistes, et tout particulièrement de notre collègue Joël Labbé que je salue ici chaleureusement. Notre groupe espérait une interdiction la plus générale et rapide possible, le texte actuel reste encore timoré au vu de l’hécatombe de biodiversité qu’ils entrainent, mais inscrire dans un texte législatif le principe de leur interdiction reste une victoire.

    Parmi les avancées à porter au crédit du groupe écologiste du Sénat, je tiens à rappeler la protection systématique des espèces endémiques identifiées comme "en danger critique" et "en danger" dans la liste rouge nationale des espèces menacées établie par l’UICN, ce qui doit permettre, si l’Etat se donne les moyens d’appliquer la loi, le sauvetage in extremis de plusieurs dizaines d’oiseaux et vertébrés d’Outre-mer.

    L’élargissement du champ de la non brevetabilité des traits natifs des espèces animales et végétales, la légalisation des échanges de semences ou la protection des allées d’arbre sont autant de dispositions favorables à la reconquête de la biodiversité et dont nous nous réjouissons d’avoir été à l’origine.

    Je m’attarde quelques instants sur la compensation des atteintes à la biodiversité, dans le cadre de la séquence Eviter, réduire, compenser, séquence encore trop peu respectée dans ses principes, d’où nombre de conflits sur les grands projets d’infrastructures. Les amendements que nous avons réussi à faire adopter renforcent l’obligation de résultats des compensations, avec, pour sa mise en œuvre, des mesures de suivi, de contrôle et de sanction plus efficientes, l’enjeu étant bien d’éviter au maximum d’avoir recours à la compensation. Et sur ce point, c’est l’Assemblée nationale qui propose le dispositif le plus satisfaisant : « Si les atteintes liées au projet ne peuvent être ni évitées, ni réduites, ni compensées de façon satisfaisante, celui-ci n’est pas autorisé en l’état. » Voilà qui avait le mérite de la clarté. Malheureusement le Sénat l’a détricoté, allant jusqu’à écrire que « les mesures de compensation exigées ne doivent ni par leur coût, ni par leur délai, être de nature à remettre en cause le projet. » Le Sénat aura ainsi cherché jusqu’à la fin de l’examen de ce texte à diminuer la portée de ce mécanisme de compensations alors qu’il y a là un cadre pour apaiser les tensions sur le terrain et trouver enfin des solutions de compromis là où le passage en force reste encore trop souvent la culture des aménageurs.

    Malgré l’urgence de la situation, avec un effondrement de la biodiversité banale, (420 millions d'oiseaux disparus en Europe sur les trente dernières années pour ne prendre qu’un seul exemple) la majorité sénatoriale de droite refuse absolument le principe même de ce texte, l’intégration dans l’action publique du principe de zéro perte nette de biodiversité, avancée pourtant nécessaire pour assurer notre propre avenir d’humain, lui aussi membre du vivant.

    Notre groupe s’indigne particulièrement du recul sur le rattrapage de la taxe sur l’huile de palme. Le Sénat l’avait pourtant introduit en 1ère lecture et le lendemain même, les lobbys de tous ordres engageaient leur travail de sape, avec des accueils bienveillants de leurs arguments sur bien des bancs... La suppression de cette disposition à l’Assemblée illustre un monde où la faiblesse des régulations économiques globales, pourtant prévues par l’OMC, nous empêche de construire de nouveaux équilibres. Très clairement, et je m’adresse là aux pays producteurs, il me parait aussi évident que les premières victimes de ces dérèglements environnementaux seront bien les pays en développement.

    Même si sur des sujets précis, grâce à notre rapporteur, il y a eu de notables avancées, le détricotage des grands principes de protection de la biodiversité par le Sénat est inquiétant pour les prochaines années où l’on risque fort d’assister au passage du discours aux actes sur le couplet « l’environnement ça commence à bien faire », passage à l’acte que nous connaissons déjà dans nombre de régions où la droite est redevenue majoritaire.

    Nous sommes en train de mettre le point final à cette loi. Mais le travail va continuer pour toutes et tous les lanceurs d’alerte et les militants de la protection de l’environnement, pour convaincre et pour préserver. Je salue leur détermination sans faille et la qualité de leur travail, sur le terrain et dans l’expertise que certains nous ont apportée sur ce projet de loi. Le meilleur hommage serait d’ailleurs probablement de voter contre ce texte en fort repli après cette dernière lecture sénatoriale.

  • 13 mai 2016. Communiqué de presse : La loi biodiversité détricotée par la droite sénatoriale

    Le groupe écologiste a voté contre le projet de loi biodiversité modifié par le Sénat au regard des graves reculs du texte opérés par la majorité sénatoriale de droite. L’esprit de compromis qui avait prévalu en 1ère lecture ne s’est pas retrouvé lors de cette 2ème lecture et les lobbys de la chimie, de l’agro-industrie, de la chasse et du béton ont pesé de tout leur poids pour freiner toute reconquête de la biodiversité.

     

    Ronan Dantec, chef de file pour le groupe écologiste du Sénat, estime que “la majorité de droite a refait de la biodiversité une variable d’ajustement des autres politiques et ne considère en rien sa reconquête comme une priorité, mais plutôt comme un obstacle pour des activités qu’elle ne souhaite pas voir évoluer.

    C’est pourtant l’avenir de l’Homme, sa santé, son bien-être et ses activités économiques, qui sont en jeu. Et ce déni de réalité ne peut que nous inquiéter pour ces prochaines années.

     

    Les sénateurs ont reculé sur la taxation de l’huile de palme, ainsi que sur les pesticides néonicotinoïdes, dont la la date butoir de retrait a été supprimée. Joel Labbé, Sénateur du Morbihan a fait part de sa profonde déception : “C’est encore la victoire des firmes de l’agrochimie et du Président de la FNSEA”.

     

    Pour Marie-Christine Blandin, Sénatrice écologiste du Nord, "les reculs opérés sur la lutte contre la biopiraterie(application de la convention de Nagoya) sont scandaleux !".

    La droite sénatoriale a détruit le juste partage des avantages des ressources génétiques, modeste droit des communautés d'habitants ultra-marins, pour accroître le bénéfice des entreprises.

    “Encore une fois, le Sénat s'est affiché peu soucieux de la biodiversité et donc des ressources des générations futures”, indique la Sénatrice.

     

    On peut tout de même relever quelques avancées à partir d’amendements écologistes : sur la protection systématique des espèces endémiques menacées, la non brevetabilité de gênes présents dans la nature dits “traits natifs”, la légalisation des échanges de semences et la protection des allées d’arbres. Nous saluons aussi le travail réalisé par le Sénat sur le préjudice écologique qui est une avancée importante du travail parlementaire.

     

    Cependant, cela ne suffit pas à rendre ce texte satisfaisant. Comme le souligne Hervé Poher, sénateur du Pas-de-Calais, citant Pierre Dac“Monsieur a son avenir devant lui, mais il l’aura dans le dos chaque fois qu’il fera demi-tour...Le Sénat a fait demi-tour”. Le groupe écologiste demande à ce que ce projet de loi, aujourd’hui gravement affaibli, retrouve son ambition avant son adoption définitive. 

  • 22 juillet 2016. Vote en lecture définitive de la loi « sur la reconquête de la Biodiversité »

    Communiqué de presse des parlementaires écologistes après le vote en lecture définitive de la loi « sur la reconquête de la Biodiversité »

    Cette loi sur la reconquête de la biodiversité, bien que contenant de nombreuses avancées, reste une loi fragile qui exigera une mobilisation de tous les acteurs pour que les actions en faveur de la biodiversité soient réellement effectives.

    Les parlementaires écologistes et apparentés se sont mobilisés jusqu’au bout pour que ce texte soit ambitieux et à la hauteur des enjeux. Après plus de deux ans de navette parlementaire, la loi de reconquête de la nature, de la biodiversité et des paysages a été adoptée en lecture définitive hier soir à l’Assemblée nationale.

    Un long parcours législatif qui a permis, en lien avec les associations de protection de la nature, des enrichissements considérables sur plusieurs points. Cette loi, à la base un texte essentiellement technocratique, a de plus été nettement amoindrie lors de ses passages au Sénat, mais a pu, grâce à la volonté des parlementaires écologistes, devenir un texte plus politique et porteur de mesures concrètes pour la protection de la biodiversité.

    L’heure est donc au bilan, pour cette première grande loi sur la nature depuis celle de 1976, qui se veut ambitieuse, avec des apports parlementaires non négligeables tels que l’intégration du principe de non-régression du droit de l’environnement et de la notion de préjudice écologique avec un dispositif majeur de réparation civile ainsi que l’interdiction des néonicotinoïdes.

    Un regret restera, celui de ne pas avoir réussi à porter jusqu’au bout la taxation sur l’huile de palme. Celle-ci avait été gagnée par amendement écologiste au Sénat, mais a été finalement remplacée par un engagement du gouvernement à travailler sur le sujet.

    Pour Laurence Abeille, Députée du Val-de-Marne et cheffe de file des députés écologistes sur ce texte à l’Assemblée Nationale, « des clivages forts sont apparus lors des débats entre les défenseurs de la biodiversité, un bien commun fragile et en grand danger, et ceux qui s'acharnent à considérer la nature comme un produit à exploiter. »

    Pour Ronan Dantec, chef de file du groupe écologiste au Sénat « c’est une loi qui va dans le bon sens mais qui ne va pas assez loin car la mobilisation des lobbys économiques qui ne veulent pas intégrer les grands enjeux environnementaux dans leurs process a affaibli cette loi. Ces résistances montrent qu’en France, a du mal à comprendre que si on ne répond pas aux enjeux environnementaux, nous mettons en cause notre avenir à court terme. »

    Retrouvez ci-dessous le bilan complet des deux ans de travail parlementaire sur les combats portés par les écologistes.

    Annexe

    Bilan des avancées portées par amendements des parlementaires écologistes

    Protection des espèces

    • Un amendement écologiste impose que les espèces endémiques les plus menacées sur la liste rouge mondiale de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) fassent systématiquement l’objet d’un plan national d’action. Pour Ronan Dantec, chef de file pour le groupe écologiste au Sénat et porteur de cette mesure, « c’est une vraie victoire pour la protection des espèces menacées, notamment dans les territoires ultra-marins. Ce dispositif est opérationnel et impose à la France d’assumer sa part de responsabilité pour le maintien de la biodiversité mondiale, grâce à des plans de protection de ses espèces les plus menacées.»
    • Interdiction des battues sur les espèces protégées
    • Sous l’impulsion des écologistes, la possibilité de mettre en place dans les documents d’urbanisme des espaces de continuités écologiques, afin de favoriser la circulation des espèces.
    • Transcription du Protocole de Nagoya encadrant l’exploitation commerciale des ressources génétiques naturelles dans le droit français. La France s’engage ainsi dans la lutte contre la biopiraterie, principe désormais inscrit dans la loi française, afin de préserver la diversité biologique et culturelle et protéger les peuples autochtones du pillage de leurs ressources et savoirs traditionnels par de grands groupes industriels. La lutte contre la biopiraterie sera une des missions de la future Agence Française pour la Biodiversité qui sera également chargée du suivi et de l’accompagnement des mécanismes d’accès aux ressources et de partage des avantages (APA) qui en découlent ; Pour Marie-Christine Blandin, sénatrice du Nord, « la transcription du Protocole de Nagoya contribue à faire dialoguer nature et culture, diversité biologique et utilisation par l'espèce humaine de cette diversité, à instaurer des règles justes pour que la valorisation par les uns ne signifie pas spoliation ou confiscation pour les autres. »
    • Elargissement du champ de la non brevetabilité des gênes présents dans la nature, dits « traits natifs » des espèces animales et végétales ;
    • Autorisation des échanges de semences à titre gratuit ou onéreux pour les utilisateurs non professionnels et les associations. Pour Joël Labbé, sénateur du Morbihan: « l'échange libre de semences fermières entre agriculteurs et de semences du domaine public entre particuliers et associations est une avancée majeure pour la biodiversité cultivée qui permettra d'augmenter la résilience de nos systèmes agricoles face au changement climatique ». Brigitte Allain salue également cette avancée mais émet des inquiétudes suite à l’adoption d’un amendement de droite, qui renforce les protections liées aux brevets sur l’information génétique, limitant de fait l’accès des paysans aux ressources génétiques au profit des industriels.

    Compensation des atteintes à la biodiversité

    Dans le cadre de la séquence – Eviter, Réduire, Compenser – encore trop peu respectée dans ses principes, les amendements des parlementaires écologistes ont permis de créer une obligation de résultats des compensations avec un objectif de zéro perte nette avec, pour sa mise en œuvre, des mesures de suivi, de contrôle et de sanction plus efficientes, l’enjeu étant bien sûr d’éviter au maximum d’avoir recours à la compensation et de respecter la hiérarchie suivante : d’abord éviter, réduire au maximum si l’évitement est impossible, et en dernier recours compenser les atteintes qui ne peuvent être ni évitées ni réduites.

    Biodiversité urbaine, des sols et paysages diurnes et nocturnes

    Les parlementaires écologistes se réjouissent de l’inscription, à leur initiative, des notions de « paysages diurnes et nocturnes » (pour lutter contre la pollution lumineuse) et de « biodiversité des sols ». Autres victoires écologistes : la biodiversité urbaine, peu présente dans le texte, mais essentielle dans l’adaptation des villes au changement climatique, est reconnue. Les écologistes ont également obtenu l’obligation, à partir de 2017, de végétaliser les toitures des centres commerciaux et d’utiliser des revêtements de surface favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales sur les aires de stationnement.

    Pour Laurence Abeille, « Il y a un véritable enjeu à préserver et reconquérir la biodiversité en ville. La densification urbaine ne doit pas se faire au détriment de la qualité de vie. Il faut construire les projets en intégrant systématiquement la nécessité de lutter contre le changement climatique. Cela veut dire une intégration de la faune et de la flore, un respect des écosystèmes ».
    Sur amendement écologiste, a également été intégrée à la loi la protection et la reconnaissance du rôle des allées d’arbres.

    Question animale

    Les écologistes ont poussé pour faire adopter des dispositifs en faveur de la condition animale : sanctions en cas d’actes de cruauté sur les animaux sauvages, interdiction de la chasse à la glu et de la chasse en période de reproduction, interdiction de la chasse de nuit, interdiction d’acquisitions d’animaux sauvages dans les cirques, mais malheureusement sans succès !

    Protection de la petite faune sauvage

    Les écologistes ont obtenu l’interdiction de la pose de poteaux creux (téléphoniques ou ceux des pare avalanches par exemple), véritables pièges pour la petite faune sauvage (petits oiseaux, rongeurs...). Toutefois, les députés écologistes regrettent que l’amendement qu’ils avaient déposé sur l’obligation de boucher les poteaux creux déjà installés n’ait pas été adopté.

    Des reculs majeurs sur l’huile de palme et les néonicotinoïdes

    Sur la question de l'interdiction des pesticides néonicotinoïdes, dont les scientifiques ont démontré les effets catastrophiques sur la mortalité des pollinisateurs, et qui a rencontré un soutien massif de la population, l’Assemblée Nationale a finalement conservé une interdiction en 2018, mais assortie de dérogations mal définies jusqu’à 2020. C'est donc avec déception que les écologistes prennent acte de cette décision qui ne semble pas à la hauteur de l’enjeu et de l’urgence.

    La troisième lecture à l'Assemblée Nationale et au Sénat a connu des reculs majeurs notamment sur la taxation de l'huile de palme qui avait été gagnée par amendement écologiste au Sénat, remplacée par un engagement du gouvernement à travailler sur le sujet... alors même que l'on connaît les conséquences dévastatrices de la culture de l'huile de palme pour la biodiversité. "On cède de façon inconsidérée à des lobbys économiques pour des résultats ravageurs: destruction de milliers d'hectares de forêt et de cultures vivrières, spoliation des populations locales au profit de multinationales. L'avantage concurrentiel incite à utiliser toujours plus d'huile de palme dans de milliers de produits alimentaires au détriment de la santé et de la production locale. En deuxième lecture le texte proposait pourtant des mesures très progressives et raisonnables", analyse Aline Archimbaud, sénatrice de Seine Saint Denis.

    Les parlementaires écologistes auront défendu la préservation de la biodiversité pour elle-même et son importance pour l'avenir de l'humanité. Une vision opposée à celle desreprésentants des lobbies de la chasse, de l’agriculture productiviste, de la pêche industrielle, défenseurs d'une vision utilitariste de l'environnement, plus soucieux de préserver les intérêts privés et de court terme.

    Nouveaux outils créés par la loi

    • les zones de préservation de la biodiversité ;
    • les obligations réelles environnementales, servitudes écologiques qui permettront à un propriétaire de « classer » son terrain selon certains critères environnementaux que devra respecter le locataire des terres ;
    • les zones de conservation halieutiques, même si cet outil s’apparente davantage à un outil à destination des pêcheurs qu’à un outil pour préserver la biodiversité ;
    • l’Agence Française pour la Biodiversité (AFB): L’une des grandes ambitions de ce texte, l’une des plus symboliques, reste la création de l’agence française pour la biodiversité (AFB), annoncée en grande pompe par le Président de la République lors de la conférence environnementale de 2012, aurait dû voir le jour le 1er janvier 2016. Or, en raison de la longueur de l’examen du texte, sa création a été retardée. De plus, le budget alloué de 200 millions d’euros n’est pas à la hauteur des enjeux (les protecteurs de la biodiversité estimaient en effet ses besoins à 400 millions d’euros). Un autre manque à souligner réside dans la composition de l’agence. L’AFB sera surtout composée par des agences œuvrant dans le domaine de l’eau et des milieux marins (ONEMA, agence des aires marines protégées). La faible représentation des agences de la biodiversité terrestre, est due notamment au refus du lobby de la chasse de voir l’intégration de l’ONCFS (Office National de la Chasse, de la Faune Sauvage) dans l’agence, au détriment d’une politique efficace de préservation de la biodiversité.

    Sénateurs-trices

    • Ronan Dantec
    • Aline Archimbaud
    • Marie-Christine Blandin
    • Corinne Bouchoux J
    • ean Desessard
    • Joël Labbé

    Député-e-s

    • Laurence Abeille
    • Brigitte Allain
    • Isabelle Attard
    • Danielle Auroi
    • Michèle Bonneton
    • Sergio Coronado
    • Cécile Duflot
    • Noël Mamère
    • Philippe Noguès
    • Jean-Louis Roumégas
    • Eva Sas

    A Paris, le 22 juillet 2016

    Cette loi sur la reconquête de la biodiversité, bien que contenant de nombreuses avancées, reste une loi fragile qui exigera une mobilisation de tous les acteurs pour que les actions en faveur de la biodiversité soient réellement effectives.

    Les parlementaires écologistes et apparentés se sont mobilisés jusqu’au bout pour que ce texte soit ambitieux et à la hauteur des enjeux.Après plus de deux ans de navette parlementaire, la loi de reconquête de la nature, de la biodiversité et des paysages a été adoptée en lecture définitive hier soir à l’Assemblée nationale.

    Un long parcours législatif qui a permis, en lien avec les associations de protection de la nature, des enrichissements considérables sur plusieurs points. Cette loi, à la base un texte essentiellement technocratique, a de plus été nettement amoindrie lors de ses passages au Sénat, mais a pu, grâce à la volonté des parlementaires écologistes, devenir un texte plus politique et porteur de mesures concrètes pour la protection de la biodiversité.

    L’heure est donc au bilan, pour cette première grande loi sur la nature depuis celle de 1976, qui se veut ambitieuse, avec des apports parlementaires non négligeables tels que l’intégration du principe de non-régression du droit de l’environnement et de la notion de préjudice écologique avec un dispositif majeur de réparation civile ainsi que l’interdiction des néonicotinoïdes.

    Un regret restera, celui de ne pas avoir réussi à porter jusqu’au bout la taxation sur l’huile de palme. Celle-ci avait été gagnée par amendement écologiste au Sénat, mais a été finalement remplacée par un engagement du gouvernement à travailler sur le sujet.

    Pour Laurence Abeille, Députée du Val-de-Marne « des clivages forts sont apparus lors des débats entre les défenseurs de la biodiversité, un bien commun fragile et en grand danger, et ceux qui s'acharnent à considérer la nature comme un produit à exploiter. »

    Pour Ronan Dantec, chef de file du groupe écologiste au Sénat « c’est une loi qui va dans le bon sens mais qui ne va pas assez loin car la mobilisation des lobbys économiques qui ne veulent pas intégrer les grands enjeux environnementaux dans leurs process a affaibli cette loi. Ces résistances montrent qu’en France, a du mal à comprendre que si on ne répond pas aux enjeux environnementaux, nous mettons en cause notre avenir à court terme. »

    Retrouvez en annexe le bilan complet des deux ans de travail parlementaire sur les combats portés par les écologistes.

    Annexe

    Bilan des avancées portées par amendements des parlementaires écologistes

    Protection des espèces 

    -      Un amendement écologiste impose que les espèces endémiques les plus menacéessur la liste rouge mondiale de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN)fassent systématiquement l’objet d’un plan national d’action.Pour Ronan Dantec, chef de file pour le groupe écologiste au Sénat et porteur de cette mesure, « c’est une vraie victoire pour la protection des espèces menacées, notamment dans les territoires ultra-marins. Ce dispositif est opérationnel et impose à la France d’assumer sa part de responsabilité pour le maintien de la biodiversité mondiale, grâce à des plans de protection de ses espèces les plus menacées.»

    -      Interdiction des battues sur les espèces protégées

    -      Sous l’impulsion des écologistes, la possibilité de mettre en place dans les documents d’urbanisme des espaces de continuités écologiques, afin de favoriser la circulation des espèces.

    -      Transcription du Protocole de Nagoya encadrant l’exploitation commerciale des ressources génétiques naturelles dans le droit français. La France s’engage ainsi dans la lutte contre la biopiraterie, principe désormais inscrit dans la loi française, afin de préserver la diversité biologique et culturelle et protéger les peuples autochtones du pillage de leurs ressources et savoirs traditionnels par de grands groupes industriels. La lutte contre la biopiraterie sera une des missions de la future Agence Française pour la Biodiversité qui sera également chargée du suivi et de l’accompagnement des mécanismes d’accès aux ressources et de partage des avantages (APA) qui en découlent ;Pour Marie-Christine Blandin, sénatrice du Nord, « la transcription du Protocole de Nagoya contribue à faire dialoguer nature et culture, diversité biologique et utilisation par l'espèce humaine de cette diversité, à instaurer des règles justes pour que la valorisation par les uns ne signifie pas spoliation ou confiscation pour les autres. »

    -      Elargissement du champ de la non brevetabilité des gênes présents dans la nature, dits « traits natifs » des espèces animales et végétales ;

    -      Autorisation des échanges de semences àtitre gratuit ou onéreux pour les utilisateurs non professionnels et les associations. Pour Joël Labbé, sénateur du Morbihan : « l'échange libre de semences fermières entre agriculteurs et de semences du domaine public entre particuliers et associations est une avancée majeure pour la biodiversité cultivée qui permettra d'augmenter la résilience de nos systèmes agricoles face au changement climatique ».Brigitte Allain salue également cette avancée mais émet des inquiétudes suite à l’adoption d’un amendement de droite, qui renforce les protections liées aux brevets sur l’information génétique, limitant de fait l’accès des paysans aux ressources génétiques au profit des industriels.

    Compensation des atteintes à la biodiversité :

    Dans le cadre de la séquence – Eviter, Réduire, Compenser – encore trop peu respectée dans ses principes, les amendements des parlementaires écologistes ont permis de créer une obligation de résultats des compensations avec un objectif de zéro perte nette avec, pour sa mise en œuvre, des mesures de suivi, de contrôle et de sanction plus efficientes, l’enjeu étant bien sûr d’éviter au maximum d’avoir recours à la compensation et de respecter la hiérarchie suivante : d’abord éviter, réduire au maximum si l’évitement est impossible, et en dernier recours compenser les atteintes qui ne peuvent être ni évitées ni réduites.

    Biodiversité urbaine, des sols et paysages diurnes et nocturnes :

    Les parlementaires écologistes se réjouissent de l’inscription, à leur initiative, des notions de « paysages diurnes et nocturnes » (pour lutter contre la pollution lumineuse) et de « biodiversité des sols ». Autres victoires écologistes : la biodiversité urbaine, peu présente dans le texte, mais essentielle dans l’adaptation des villes au changement climatique, est reconnue. Les écologistes ont également obtenu l’obligation, à partir de 2017, de végétaliser les toitures des centres commerciaux et d’utiliser des revêtements de surface favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales sur les aires de stationnement.

    Pour Laurence Abeille, « Il y a un véritable enjeu à préserver et reconquérir la biodiversité en ville. La densification urbaine ne doit pas se faire au détriment de la qualité de vie. Il faut construire les projets en intégrant systématiquement la nécessité de lutter contre le changement climatique. Cela veut dire une intégration de la faune et de la flore, un respect des écosystèmes ».

    Sur amendement écologiste a également été intégrée à la loi la protection et la reconnaissance du rôle des allées d’arbres.

    Question animale :

    Les écologistes ont poussé pour faire adopter des dispositifs en faveur de la condition animale : sanctions en cas d’actes de cruauté sur les animaux sauvages, interdiction de la chasse à la glu et de la chasse en période de reproduction, interdiction de la chasse de nuit, interdiction d’acquisitions d’animaux sauvages dans les cirques, mais malheureusement sans succès !

    Protection de la petite faune sauvage

    Les écologistes ont obtenu l’interdiction de la pose de poteaux creux (téléphoniques ou ceux des pare avalanches par exemple), véritables pièges pour la petite faune sauvage (petits oiseaux, rongeurs…). Toutefois, les députés écologistes regrettent que l’amendement qu’ils avaient déposé sur l’obligation de boucher les poteaux creux déjà installés n’ait pas été adopté.

    Des reculs majeurs sur l’huile de palme et les néonicotinoïdes :

    Sur la question de l'interdiction des pesticides néonicotinoïdes,dont les scientifiques ont démontré les effets catastrophiques sur la mortalité des pollinisateurs, et qui a rencontré un soutien massif de la population, l’Assemblée Nationale a finalement conservé une interdiction en 2018, mais assortie de dérogations mal définies jusqu’à 2020. C'est donc avec déception que les écologistes prennent acte de cette décision qui ne semble pas à la hauteur de l’enjeu et de l’urgence.

    La troisième lecture à l'Assemblée Nationale et au Sénat a connu des reculs majeurs notamment sur la taxation de l'huile de palme qui avait été gagnée par amendement écologiste au Sénat, remplacée par un engagement du gouvernement à travailler sur le sujet... alors même que l'on connaît les conséquences dévastatrices de la culture de l'huile de palme pour la biodiversité. "On cède de façon inconsidérée à des lobbys économiques pour des résultats ravageurs: destruction de milliers d'hectares de forêt et de cultures vivrières, spoliation des populations locales au profit de multinationales. L'avantage concurrentiel incite à utiliser toujours plus d'huile de palme dans de milliers de produits alimentaires au détriment de la santé et de la production locale. En deuxième lecture le texte proposait pourtant des mesures très progressives et raisonnables", analyse Aline Archimbaud, sénatrice de Seine Saint Denis.

    Les parlementaires écologistes auront défendu la préservation de la biodiversité pour elle-même et son importance pour l'avenir de l'humanité. Une vision opposée à celle des représentants des lobbies de la chasse, de l’agriculture productiviste, de la pêche industrielle, défenseurs d'une vision utilitariste de l'environnement, plus soucieux de préserver lesintérêts privés et de court terme.

    Nouveaux outils créés par la loi :

    -      les zones de préservation de la biodiversité ;

    -      les obligations réelles environnementales, servitudes écologiques qui permettront à un propriétaire de « classer » son terrain selon certains critères environnementaux que devra respecter le locataire des terres ;

    -      les zones de conservation halieutiques, même si cet outil s’apparente davantage à un outil à destination des pêcheurs qu’à un outil pour préserver la biodiversité ;

    -    l’Agence Française pour la Biodiversité (AFB):L’une des grandes ambitions de ce texte, l’une des plus symboliques, reste la création de l’agence française pour la biodiversité (AFB), annoncée en grande pompe par le Président de la République lors de la conférence environnementale de 2012, aurait dû voir le jour le 1er janvier 2016. Or, en raison de la longueur de l’examen du texte, sa création a été retardée. De plus, le budget alloué de 200 millions d’euros n’est pas à la hauteur des enjeux (les protecteurs de la biodiversité estimaient en effet ses besoins à 400 millions d’euros).Un autre manque à souligner réside dans la composition de l’agence. L’AFB sera surtout composée par des agences œuvrant dans le domaine de l’eau et des milieux marins (ONEMA, agence des aires marines protégées). La faible représentation des agences de la biodiversité terrestre, est due notamment au refus du lobby de la chasse de voir l’intégration de l’ONCFS (Office National de la Chasse, de la Faune Sauvage) dans l’agence, au détriment d’une politique efficace de préservation de la biodiversité.

  • 24 janvier 2016. "Le Sénat améliore le projet de loi sur la biodiversité"

    Un bilan très hétérogène de l'examen au Sénat du projet de loi sur la biodiversité : des régressions, mais aussi de belles avancées, sur des sujets importants.

    Le Sénat améliore le projet de loi sur la biodiversité

    Article de Liberation en ligne ici.

    Le Sénat a amélioré le projet de loi sur la biodiversité dont il a achevé l’examen en première lecture vendredi, notamment en autorisant la France à ratifier le protocole de Nagoya et en encadrant l’utilisation des insecticides néonicotinoïdes. Ces derniers agissent sur le système nerveux des insectes, en particulier des abeilles.

    Le texte modifié fera l’objet d’un vote solennel le 26 janvier après quoi il repartira en deuxième lecture à l’Assemblée. Son adoption définitive est prévue avant l’été.

    «Le Sénat a su transcender les clivages politiques pour rapprocher les points de vue en recherchant l’intérêt général de notre avenir commun et en mettant la France très en avance sur les enjeux de la biodiversité et du climat», a déclaré à l’issue des travaux la ministre de l’écologie Ségolène Royal.

    «Je vais veiller à ce que l’Assemblée nationale respecte vos travaux et les enrichissements apportés à ce texte», a-t-elle ajouté.

    Le Sénat a ainsi donné son feu vert à l’élément phare du projet, la création de l’Agence française pour la biodiversité, qui rassemblera des réseaux de chercheurs et de scientifiques de haut niveau. Son organisation a été précisée, en particulier les partenariats avec les collectivités territoriales.

    Il a inscrit le préjudice écologique dans la loi tandis que la ratification du Protocole de Nagoya sur le partage équitable des bénéfices issus de l’exploitation des ressources naturelles à travers la planète concrétise un engagement international pris il y a 25 ans lors du Sommet de la Terre à Rio en 1992.

    Les sénateurs ont par ailleurs interdit le brevetage des «produits issus de procédés essentiellement biologiques» (gènes natifs) pour lever le frein à l’innovation provoqué par la multiplication des dépôts de brevets sur le vivant. En revanche, ils ont autorisé l’échange de semences traditionnelles.

    De son côté, la protection de la biodiversité marine a été renforcée avec la création de la 5ème plus grande réserve marine du monde dans les eaux des Terres Australes Françaises, la création de zones de conservation halieutique en lien avec les pêcheurs pour une gestion durables des populations de poissons, ou l’obligation d’une autorisation pour les activités en haute mer (recherche, extraction, plateforme de transport de marchandises etc.).

    Le texte qui crée un système de compensation consolidé met aussi en place des plans d’actions pour toutes les espèces menacées et renforce des outils à destination des maîtres d’ouvrages pour les aider à réaliser leurs projets tout en évitant les atteintes à l’environnement.

    Pour leur part, les sénateurs écologistes ont estimé que si les lobbies ont souvent bloqué des articles, certains amendements marquent «de réelles avancées».

    Parmi ces avancées, ils citent l’obligation que les espèces les plus menacées sur la liste rouge mondiale de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) fassent systématiquement l’objet de plans d’actions ou de mesures de protection.

    «C’est une vraie victoire pour la protection des espèces menacées, notamment dans les territoires ultra-marins», a développé leur chef de file Ronan Dantec.

    Ils se sont félicités de la suppression de l’avantage fiscal de l’ huile de palme par rapport aux autres huiles végétales.«La culture du palmier à huile, outre ses conséquences néfastes sur la santé des consommateurs, est largement responsable de la destruction de forêts en Asie du Sud-Est», a souligné Aline Archimbaud.

    Au titre des regrets Ronan Dantec a indiqué le rétablissement de la pêche au chalutage en eaux profondes, alors que la commission du développement durable l’avait supprimée, ou l’absence d’évolutions sur la pratique de la chasse.

  • 3 septembre 2013. Ronan Dantec expose les enjeux d'Ecocity, sommet mondial des villes durables, à Nantes du 25 au 27 septembre

    Président du comité d'orientation d'Ecocity, Ronan Dantec révèle les enjeux du sommet mondial des villes durables, qui se tiendra à Nantes du 25 au 27 septembre.

    Interview parue sur youphil.com, le média de toutes les solidarités (Propos recueillis par Elodie Vialle)

    "2015 sera l'année du développement durable"

    Youphil.com: En quoi consiste Ecocity?

    Ronan Dantec: Ecocity, c'est le sommet mondial de la ville durable. C'est le moment, tous les deux ans, où l'ensemble des acteurs mondiaux (les élus, les grandes entreprises, les scientifiques, etc.) se regroupent pour échanger sur les défis de la ville durable et connaître les dernières découvertes pour accélérer le changement.


    En quoi les villes sont-elles des acteurs du développement durable?

    La moitié de la population mondiale est urbaine, et 70% des émissions de gaz à effet de serre sont produites dans les villes. Si on veut répondre quantitativement aux grands enjeux du développement durable (climat, biodiversité, enjeux sociaux), cela se passe dans les villes.

    Les grands textes internationaux le disent clairement: il faut organiser la ville pour qu'elle réduise ses émissions de gaz à effets de serre, son alimentation car elle réduit considérablement l'espace agricole pour se nourrir et gaspille beaucoup la terre. On a aujourd'hui besoin d'une ville qui se pose la question de sa responsabilité, qui s'organise autrement.


    Quelles sont les villes en avance? Quels exemples pourriez-vous donner?

    La ville de Copenhague avec laquelle nous travaillons depuis des années a aujourd'hui l'objectif d'être neutre en carbone. Cela passe par une mobilité où le vélo joue un rôle essentiel, mais aussi un investissement très fort dans l'éolien marin par exemple.


    Ces choix peuvent-ils être appliqués dans d'autres villes, comme Nantes?

    Nantes est capitale verte de l'Europe. Nous avons un plan climat avec un objectif de moins 35% d'émissions de carbone en 2020 -donc bien plus que les objectifs européens- et pour l'instant nous tenons nos objectifs.

    Les émissions de CO2 diminuent dans la ville. La part du déplacement automobile baisse rapidement grâce à une politique très volontariste sur les transports en commun depuis une trentaine d'années, mais aussi une "politique vélo" qui commence à porter ses fruits.

    Nous sommes également très investis dans la biodiversité puisque nous avons un classement Natura 2000 en centre urbain. Pratiquement personne ne l'a fait, pas seulement en France, mais aussi en Europe.

    Il y aussi des exemples dans les villes chinoises, ou aux Etats Unis. A Seattle par exemple, le transport public est gratuit dans l'hypercentre. C'est une ville qui travaille fortement sur son alimentation en eau.


    Moins 35% d'émissions de gaz à effet de serre pour Nantes en 2020... Est-ce tenable si l'on construit un aéroport?

    Ce projet n'est pas sur le territoire de l'agglomération, et ne faisait donc pas partie de l'évaluation Nantes capitale verte.

    C'est un débat vif à Nantes, et tout le monde connaît mon opposition au projet. Le sommet mondial d'Ecocity est là pour confronter ces différentes visions. Même s'il y a cette opposition forte entre nous sur ce projet d'aéroport, on est d'accord sur le fait qu'on doit assumer notre part de responsabilité globale sur le climat. Il y aura à Ecocity des partisans du pour et du contre.


    Vous dites que le financement est l'un des points les plus importants. Avez-vous des exemples de ce qui pourrait fonctionner?

    L'un des enjeux sur le financement est de savoir comment on va utiliser tous les fonds des grands accords internationaux: le fonds vert décidé à Copenhague, le fonds d'adaptation qui se précise depuis Durban [novembre 2011]. L'affectation des taxations sur les transactions financières, peut-être demain de nouvelles taxes carbones en France, en Europe ou dans le monde. Ces flux doivent être organisés pour être alloués à des villes qui vont mettre en place des modèles de développement durable sur le plan environnemental et social.

    Nous devons aussi réfléchir à des actions sur le climat certifiables dans les systèmes onusiens, afin de faciliter leur accès à des financements.

    Autre question: les grandes entreprises ont-elles les nouveaux cadres financiers cohérents pour intervenir dans les villes du Sud, fournir un service de qualité, mais aussi trouver un modèle économique pour permettre de financer l'investissement? Certains ont cru au partenariat public-privé au-delà du raisonnable, après Johannesbourg.

    Nous essaierons de voir où nous en sommes, dix ans après.
    Nous parlerons aussi, entre autres, des technologies liées au portable: comment les utiliser pour trouver des financements afin de renforcer l'accès à l'eau potable?


    Plusieurs acteurs (privés, publics, société civile) participent à Ecocity. Mais la construction des villes durables ne relève-t-elle pas avant tout de la commande publique?

    Il y a un enjeu majeur de l'action politique, et derrière, de la commande publique. Aujourd'hui, les règles d'urbanisme ne permettent pas, par exemple, de lutter efficacement contre l'étalement urbain.

    Au-delà de la commande publique, c'est aussi la mobilisation de l'ensemble des acteurs et la mise en cohérence d'une vision partagée de la ville qui est essentielle.

    Si on a juste la décision politique, mais qu'elle ne s'appuie pas sur des acteurs mobilisés, on n'y arrivera pas. On n'est pas dans un monde ou seul le politique décide. S'il ne décide pas, cela ne marche pas. S'il décide seul, cela ne marche pas non plus.


    Cette rencontre s'inscrit dans un contexte international de débats sur le climat... quelles seront les prochaines étapes?

    Nous allons notamment présenter la feuille de route mondiale des collectivités jusqu'à Paris 2015. Ecocity s'inscrit dans un calendrier international: l'année 2015, avec la conférence Climat et les discussions sur les Objectifs du millénaire pour le développement, sera l'année la plus importante pour le développement durable, depuis le sommet de Rio en 1992.


    Tous ces colloques internationaux où les gens passent leur temps dans l'avion pour venir discuter du climat et du réchauffement climatique, n'est-ce pas un peu problématique?

    Non, il faut que les gens se rencontrent, et on ne fera jamais une vidéo conférence vidéo à 3000. L'important est que ces colloques servent à quelque chose, qu'il ne s'agisse pas de refaire le monde en cercle clos, dégagés des agendas internationaux.

    Ronan Dantec est sénateur écologiste de Loire-Atlantique, vice-président de la commission développement durable du Sénat, conseiller municipal de Nantes, président du comité d'orientation d'Ecocity, sommet mondial des villes durables.

     

  • 7 mai 2019. Sur la loi biodiversité et les espèces protégées : question au gouvernement de Ronan Dantec

    Ronan Dantec a interrogé Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, sur l'état d'avancement des plans nationaux d'action sur les espèces protégées prévus par la loi biodiversité au regard du récent constat dressé par le rapport publié par le groupe international d’experts sur la biodiversité des Nations Unies (IPBES) le 6 mai 2019 qui confirme que nous sommes à l'origine et subissons la sixième extinction massive du vivant. Au vu de la réponse du Gouvernement (que vous trouverez ci-dessous) qui fait état du retard pris dans la mise en œuvre de ces plans, il espère que cet engagement international de la France sera tenu rapidement.

     

    M. Ronan Dantec. Ma question s’adresse à M. François de Rugy et complétera celle de Jérôme Bignon.

    Le Président de la République a eu des mots forts pour commenter le rapport dramatique de l’IPBES, évoquant des faits « cruels » et la nécessité de changer de modèle économique de production. Il n’est pas le premier à trouver les mots. Tout le monde se rappelle l’orfèvre en la matière que fut Jacques Chirac, lors du sommet de la Terre, à Johannesburg. À l’inverse de ses prédécesseurs, qui ont finalement beaucoup laissé brûler la maison, Emmanuel Macron sera-t-il le premier à définir et appliquer des politiques publiques à la hauteur de ces défis redoutables ? La crédibilité de la réponse passera par des actes, rien que par des actes, et par de vrais investissements.

    À l’heure où, mû par une légitime émotion, notre pays se mobilise pour reconstruire une cathédrale au cœur de son histoire, l’État peut-il laisser se perdre des pans entiers de son patrimoine naturel ? Aujourd’hui, 120 espèces endémiques sont en danger d’extinction en France, notamment dans les territoires ultramarins, où beaucoup de ces espèces se portent bien plus mal que le bouquetin dans les Alpes.

    Nous avons voté, dans la loi Biodiversité, et j’ai eu l’honneur de porter cet amendement, un article disposant que toutes ces 120 espèces devraient, d’ici au 1er janvier 2020, faire l’objet d’un plan national d’action. Je vous rejoins sur ce sujet : les plans nationaux d’action se sont souvent traduits par des résultats remarquables.

    Monsieur le ministre d’État, ma question est simple et précise : où en est-on ? La France tiendra-t-elle cet engagement et à quel coût ? Sauver la biodiversité ne consiste bien évidemment pas à se payer de mots, mais à investir résolument dans l’avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Jérôme Bignon applaudit également.)

    M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

    Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Vous avez raison, monsieur le sénateur, nous sommes à un moment important pour la biodiversité, marqué à la fois par le rapport de l’IPBES, que vous avez cité, par le G7 des ministres de l’environnement, à Metz, sous l’égide de François de Rugy, qui a tenu à mettre la biodiversité au cœur des discussions intergouvernementales, et par le discours du Président de la République, après sa rencontre avec les scientifiques de l’IPBES, qui a déclaré que nous allions agir.

    Nous allons agir en consacrant le premier conseil de défense écologique, qui se tiendra autour du Président de la République avant la fin de ce mois, à la préservation de la biodiversité. Nous allons agir sur la transition agricole, nous allons agir sur l’étalement urbain et la lutte contre l’artificialisation des sols, nous allons agir sur la lutte contre le gaspillage et les déchets.

    Vous posez une question précise sur les espèces endémiques en danger, qui doivent faire l’objet, comme vous l’avez souligné, depuis la loi Biodiversité de 2016, de plans de protection, dits plans nationaux d’action, ou PNA.

    Nous avons lancé 65 PNA, dont 16 pour des espèces ou des plantes ultramarines. Comme nous le savons tous, les grands enjeux se situent très largement en outre-mer, où est concentrée 80 % de notre biodiversité.

    Ces 65 plans, en cours de mise en œuvre, concernent à la fois des espèces classiques en métropole – je pense, par exemple, au milan royal ou à l’aigle de Bonelli – et des espèces ultramarines : l’iguane des Petites Antilles, le gecko vert de La Réunion, les tortues marines des Antilles et de la Guyane. Un plan concernant l’albatros des TAAF est également en cours de lancement.

    Nous allons continuer ce travail indispensable sur ces plans. C’est à l’ordre du jour de l’Agence française pour la biodiversité, et bientôt de l’OFB, ou Office français de la biodiversité, qui sera créé au 1er janvier 2020. Nous allons travailler pour lancer des plans complémentaires et peut-être en regrouper certains afin de couvrir les 120 espèces concernées. C’est notre objectif, et il est important.

    M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour la réplique.

    M. Ronan Dantec. Je vous remercie de cette réponse précise, madame la secrétaire d’État.

    Le milan royal n’étant pas une espèce endémique, cela signifie qu’il reste encore probablement une centaine d’espèces endémiques en voie de disparition qu’il convient de protéger par des plans.

    J’espère que nous tiendrons, à quelques mois près – il est clair que l’échéance du 1er janvier 2020 ne sera pas atteinte –, cet engagement international de la France, car il s’agit bien d’un engagement international.

  • décembre 2016 - mai 2017 : Ronan Dantec est rapporteur de la commission d'enquête sur la compensation des atteintes à la biodiversité dans le cadre des grands projets

    Un travail de fond pour rendre plus efficace l'application de la séquence Eviter Réduire Compenser dans les grands projets d'infrastructures

    Ronan Dantec était rapporteur de la commission d'enquête sur la compensation des atteintes à la biodiversité dans le cadre des grands projets d'infrastructures. Cette commission d'enquête avait été initiée par le groupe écologiste (c'est un droit des groupes parlementaires de pouvoir créer une telle instance une fois par an). Ce travail de 6 mois vient de s'achever avec un rapport adopté de façon consensuelle après un long travail de conviction, la majorité de droite pouvant à tout moment rejeter le rapport et ainsi interdire la publication de l’ensemble des analyses et des conclusions.

    Avec 135 personnes auditionnées (scientifiques, associations, juristes, élus, représentants de l'Etat) et 4 déplacements (Notre Dame des Landes, chantier de la LGV Tours-Bordeaux, autoroute A65, réserve de la Crau), cette commission formule 35 propositions pour sécuriser la compensation écologique qui ne doit pas être un droit à détruire. Au contraire, le rapport, consultable en ligne sur le site du Sénat, propose des pistes concrètes pour prévenir les destructions de biodiversité, en cherchant réellement à éviter les atteintes, puis en tentant de les réduire, avant de compenser, en dernier lieu seulement les destructions du patrimoine naturel qui n'auront pu être ni évitées ni réduites. C'est un important changement d'ordre des priorités pour les grands projets qui est ainsi recommandé car pour l'instant, l'intérêt public d'un projet est déclaré sans prise en compte des dommages à l'environnement, et ce n'est qu'ensuite que les éventuelles dégradations de l'environnement sont examinées.

    Plus précisément, parmi les propositions clés de la commission d'enquête, soulignons : les compensations doivent s'appuyer sur un consensus scientifique ; l'étude d'impact doit intégrer l'enjeu biodiversité et le maître d'ouvrage répondre sur ces enjeux dans l'enquête publique ; l'application de la séquence ERC a en particulier pour objectif la réduction de la perte de terres agricoles ; la mise en œuvre de la compensation devrait être transparente notamment sur le plan financier.

    Cette commission d'enquête intervient dans le cadre de la réflexion actuelle sur la prise en compte de la biodiversité dans les grands projets suite à la loi biodiversité de 2016, qui a amélioré l'encadrement juridique de la compensation écologique, et amené de nouvelles exigences telles que l'obligation de résultat sur les mesures engagées et l'obligation d'abandonner un projet si les destructions de l'environnement ne peuvent pas être compensées.

    Cette commission d'enquête se situe donc le prolongement du travail législatif de Ronan Dantec sur la loi biodiversité avec de nombreux amendements gagnés pour faire passer l'environnement et la biodiversité au premier plan au moment de la prise de décision sur les projets d'aménagement et durcir les conditions de la compensation écologique (obligation de résultat, imposer des mesures correctives en cas d'échec des mesures compensatoires prévues initialement, possibilité d'imposer des garanties financières liées à la mise en oeuvre des mesures compensatoires...).

     

    De nouveaux éléments pour une remise à plat du projet d'aéroport à Notre Dame des Landes

    Les nombreuses auditions sur le projet d’aéroport à Notre Dame des Landes ont démontré que la compensation écologique est extrêmement difficile à réaliser dans ce projet. Comme il l'a toujours dit et fait sur ce dossier, Ronan Dantec considère que ce n'est qu'en remettant à plat les différentes données scientifiques, techniques et politiques que le blocage sur ce projet pourra être levé. La commission d'enquête ayant auditionné l’ensemble des acteurs de ce projet (préfet, syndicat mixte aéroportuaire, AGO-Vinci, commission du dialogue, collège des experts scientifiques, syndicats agricoles, bureaux d'étude, CGEDD, opposants historiques), les éléments exposés devant cette commission d'enquête sont de nature à contribuer à la remise à plat du projet au regard de témoignages recueillis, comme l'absence aujourd'hui de validation scientifique de la méthode de compensation choisie.

     

    Plus d'informations en cliquant sur les liens suivants :


    Le rapport en ligne : Compensation des atteintes à la biodiversité : construire le consensus
    La synthèse en 4 pages

    La liste des 35 propositions
    L'infographie sur les propositions clé de la commission d'enquête

    Les compte-rendus d'audition : écrit ou vidéo

    Et quelques retours presse : dans Le Monde, dépêche AEF, l'Humanité, Le Moniteur, Actu-environnement

  • Mardi 19 janvier 2016. Intervention de Ronan Dantec sur le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages

    Ronan Dantec, est chef de file du groupe écologiste sur le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, dont l'examen a commencé cet après-midi au Sénat.

    Vous trouverez ci-dessous le texte de son intervention en ouverture du débat.

    Au cours des débats, qui s'étendront au moins jusqu'à jeudi soir, le groupe écologiste présentera plus de 100 amendements, dont un certain nombre a reçu un avis favorable en commission aujourd'hui, notamment:

    • mise en place de plans d'action ou de mesures de protection renforcées pour toutes les espèces présentes sur le territoire français classées "en danger critique" et "en danger" de la liste rouge mondiale de l'UICN ;
    • non brevetabilité du vivant, non seulement des produits végétaux et des animaux issus de procédés essentiellement biologiques mais aussi de leurs parties et composantes génétiques ;
    • consultation du comité régional de la biodiversité dans le cadre de l'élaboration du Schéma régional d'aménagement du territoire (SRADDET) ;
    • étendre le champ d'intervention de l'Agence française de la biodiversité (AFB) à l’ensemble des milieux marins, y compris les zones placées sous la juridiction de l’Etat, le domaine public maritime et le plateau continental ;
    • participation des fondations reconnues d'utilité publique ayant pour objet principal la protection de l’environnement au CA de l'AFB.

    Intervention de Ronan Dantec sur le projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages

    Mme la Ministre, M. le rapporteur,M. le Président de la commission,Chers collègues,

    Au moment d'entamer, enfin, près d'un an déjà après la première lecture à l'Assemblée nationale, la discussion sur ce projet de loi biodiversité, je ne peux qu'exprimer mes craintes quant à la nature du débat que nous allons connaître.

    Nous ne pouvons en effet que craindre, au-delà de discours généreux sur l'importance de la biodiversité, les coalitions entre tenants d'une agriculture toujours plus shootée aux produits phytosanitaires, porte-voix des défenseurs du droit de chasser sans contrainte, et défenseurs de grandes infrastructures qui font marcher le BTP, que donc ces coalitions ne transforment le Senat en caisse de résonance de cette petite musique de "l'environnement, ça commence à bien faire", ici reprise en chœur.

    Il faut je crois, Mme la Ministre, beaucoup d'abnégation pour tenter de faire avancer ce pays dans la voie d'une approche raisonnable des questions de la protection de la nature, tant ce pays, plus que d'autres, semble rechigner à considérer la biodiversité comme un enjeu majeur de politiques publiques, nourrissant le déni des conséquences désastreuses d'un effondrement de cette biodiversité, socle pourtant de notre alimentation, de notre santé et bien sûr de notre climat.

    Pour n'en prendre qu'un seul exemple, il suffit de comparer la situation de l'ours en France et dans les pays voisins, en Italie ou en Espagne, où il est un étendard des campagnes de promotion touristique. Presque partout en Europe, les populations sont aujourd’hui plutôt en progression, 7% de plus en 7 ans dans l'Union européenne. En Grèce, un tracé d'autoroute a même été modifié pour préserver les populations.

    Pourtant en France, cet été, deux ours bruns mâles se sont frottés désespérément aux arbres, ont laissé leur odeur un peu partout en espérant rencontrer des femelles qui n'existent plus sur l'ouest des Pyrénées. Ainsi, nous allons débattre d'une loi sur l'enjeu majeur de la préservation de la biodiversité, de la préservation de la faune sauvage, alors que la France, membre permanent du Conseil de Sécurité des Nations Unies, n'est pas capable de relâcher deux ourses, de trouver en son sein le minimum de consensus pour préserver son plus grand carnivore.

    C’est dans ce contexte particulier que cette loi tente de se forger un chemin, dans un pays où certains considèrent encore possible de défendre la chasse à la glu au nom d’on ne sait quelle tradition historique ou culturelle. Je suis presque surpris que nous n’ayons pas eu un amendement sur le retour des pièges à mâchoires.

    Pour préserver et reconquérir la biodiversité en France, nous savons globalement quels sont les enjeux. Tout d’abord, préserver le territoire, éviter la perte du sol, trop facilement artificialisé, fragmenté par des infrastructures, les mitages et les étalements d’urbanisation. Je regrette d’ailleurs, nous en avons reparlé en commission, que ce principe de la protection des sols n’ait pas été plus fortement réaffirmé dans la loi.

    La cohérence globale de la trame verte et bleue et des continuités écologiques est justement un des véritables progrès apportés ces dernières années à la gestion de la biodiversité en France. Le Schéma régional de cohérence écologique et le Schéma régional d’aménagement du territoire, avec son caractère prescriptif, sont de réelles avancées dans les lois que nous avons adoptées l’année dernière. On ne peut donc que s’inquiéter de certaines déclarations, comme celle de Xavier Bertrand, nouveau président de la région Nord-Pas-de-Calais–Picardie, de remise en cause du SRCE, outil pourtant clé de préservation de la biodiversité. Nous voyons donc bien avec cet exemple inquiétant que le combat n’est pas encore totalement gagné...

    Espérons qu’avec cette loi, avec une vision plus globale et partagée, et ce sera un des rôles de l’Agence Française de la Biodiversité, nous réussirons à gagner définitivement cette bataille culturelle, tant certaines avancées restent encore fragiles. Cette fragilité se retrouve notamment dans les moyens de l'agence dont certains orateurs ont avant moi souligné les faiblesses. De même le maintien de deux polices de l'environnement différentes, dépendant de deux agences, est une aberration au moment où nous insistons tous sur la rationalisation des moyens de l'action publique.

    Dans les combats encore à mener, la question de la compensation est centrale. Nous savons que pour certains aménageurs, les principes « Eviter, réduire, Compenser » se transforment en « surtout éviter et réduire toutes mesures de compensation ». La loi devra aller vers l’obligation de résultat en termes d’équivalence écologique, j’espère que le débat au Sénat permettra d’avancer sur ce point et de définir des mesures de suivi et de contrôle efficientes, l’enjeu étant bien d’éviter au maximum d’avoir besoin de compensation.

    Je ne reviens pas dans cette courte intervention sur d’autres enjeux. Les agressions chimiques restent une autre des grandes raisons de perte de biodiversité, et le débat sur les néonicotinoïdes devra intégrer les dernières recommandations de l’ANSES sur leur dangerosité, mon collègue Joël Labbé y reviendra toute l’heure.

    La non-privatisation des ressources naturelles, le refus de la brevetabilité à tout va spoliant les communautés traditionnelles de leur savoir-faire est un enjeu important, mais Marie-Christine Blandin aura l’occasion de proposer des amendements d’encadrement.

    Chers collègues, cette loi porte plusieurs avancées, et je remercie Mme la Ministre de son écoute, qui a déjà permis à l’Assemblée d’intégrer des progrès importants mais, nous le savons, elle est encore imparfaite pour répondre à l’enjeu, qui est de stopper la perte du vivant, de trouver l’équilibre entre activités humaines et préservation des écosystèmes. Nous n’avons pourtant pas le choix. Si nous ne trouvons pas cet équilibre, c’est bien notre avenir que nous menaçons. Peu de débats disent autant la difficulté de se dégager du court terme, voire parfois de la prochaine échéance électorale. La commission du Développement durable, avec son rapporteur Jérôme Bignon, qui a beaucoup travaillé, a souvent amélioré le texte et justement regardé le long terme. Essayons donc de poursuivre dans cette voie, et de faire que nos deux ours célibataires ne se morfondent plus dans la solitude des Pyrénées françaises.

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