Madame la Présidente,

Monsieur le Ministre,

Madame l’auteure, Madame la rapporteure,

 

C’est avec conviction que les élus Europe-Ecologie Les Verts s’associent à cette proposition de loi visant à strictement limiter et encadrer le travail du dimanche.

Beaucoup a déjà été dit sur l’enjeu politique de légiférer sur cette question, alors que ce droit, acquis de haute lutte il y a plus d’un siècle, a été progressivement remis en cause, par exemple par la loi Maillé de 2009, déclinaison dominicale du fameux slogan « travailler plus pour gagner plus », un slogan aujourd’hui daté mais que de nombreux salariés modestes gardent en mémoire comme une terrible tromperie politique.

Deux ans après cette loi, les salariés modestes ne sont pas devenus plus riches, notre taux de chômage ne s’est pas réduit mais, sans nul doute, nombre de salariés en situation difficile et dans l’incapacité de refuser de travailler le dimanche ont vu leur vie de famille et leurs relations sociales se compliquer, pour un gain sans commune mesure avec les contraintes subies.

J’en profite d’ailleurs pour évoquer ici un autre scandale de nos sociétés, cette habitude installée, que nous ne retrouvons pas dans la plupart des autres pays européens, et qui fait que les bureaux de salariés aux emplois souvent garantis, sont nettoyés au petit matin ou le soir par d’autres salariés en situation bien plus précaire, par exemple des femmes à la tête de familles monoparentales, sans considérer un instant les difficultés ainsi créées, en termes de transports ou de gardes d’enfants. D’un côté, un gain très faible, quelques minutes de dérangement, de l’autre, des quotidiens très dégradés. Ainsi va notre société, dans son incapacité à mesurer les coûts globaux et les intérêts collectifs.

 

La question posée par ce débat, pour reprendre l’avis du Conseil Economique et Social (CES), qui n’était pas encore le CESE, est donc bien, je cite, « la question du mode de société auquel nous aspirons », et nous ne pouvons que nous ranger à sa conclusion, je cite : « le CES recommande de ne pas banaliser cette journée  en généralisant l’ouverture des commerces et de maintenir le principe du repos dominical ».

 

Madame Pasquet a fait référence à l’histoire des luttes sociales qui ont abouti au repos dominical et je voudrais compléter ses propos.

En 1906, c’est au lendemain d’une grève générale dont le mot d’ordre était, on l’a un peu oublié, la journée de 8 heures, que le Sénat vota la loi sur le repos hebdomadaire, sous la pression de la rue, et notamment des employés du commerce, très nombreux à Paris depuis la création à la fin du XIXème siècle des grands magasins. La réponse par le dimanche chômé ne correspondait donc pas totalement aux revendications de la journée d’action du 1<sup>er</sup> mai 1906, mais c’était bien sûr une avancée sociale majeure. Je souhaiterais citer les propos de M. Luquet, secrétaire des coiffeurs de la CGT de l’époque qui, dans l’hebdomadaire confédéral, déclarait alors : « Le résultat matériel le plus tangible de la campagne, qui durant 18 mois a maintenu la classe ouvrière en haleine pour la mettre debout au 1<sup>er</sup> mai 1906, est, sans contredit, la conquête du repos hebdomadaire ». Ce résultat sera néanmoins longtemps contesté par les propriétaires de grands magasins, qui argueront du fait que les autres ouvriers n’ont pas le temps de faire leurs courses durant la semaine en raison de la durée quotidienne du temps de travail, souvent de 10 heures à l’époque. Ils obtiendront de très nombreuses dérogations et, finalement, les employés du commerce n’auront vraiment des garanties pour leur dimanche chômé qu’avec l’instauration de la journée de 8 heures pour les ouvriers et les employés. Ce sera en 1919, en attendant la semaine de 40 heures, en 1936.

Il y a donc toujours eu un lien fort entre travail du dimanche des salariés du commerce et réduction du temps de travail et, si le gouvernement Fillon s’est attaqué, avec la loi Maillé, au repos dominical des salariés du commerce, c’est bien parce que la droite sarkozyste voulait, et veut toujours, aussi remettre en cause les 35 heures et la durée du temps de travail hebdomadaire, et nous devons donc sur ce point rester très mobilisés.

Voter aujourd’hui pour le respect du repos dominical est donc un enjeu fort qui s’inscrit dans la défense des autres acquis sociaux, et les écologistes soutiendront ce texte.

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